Voici un article un peu inhabituel… C’est autant un test qu’une note d’humour.
Certains randonneurs partent avec, dans leur sac à dos, une ration de combat, individuelle et réchauffable, comme le soldat moyen de l’armée française opérant sur le terrain, et de beaucoup d’autres armées encore ! On peut facilement en acheter sur Internet (prix moyen : 13 € la boîte) ; une ration permet de tenir 24 heures, en apportant une valeur énergétique moyenne de 3 200 kcal. J’ai voulu tester une telle alimentation durant 24 heures, mais sans combattre, rassurez-vous…
Tout est parti d’un cadeau fait l’an dernier, avec cœur mais non sans humour, par un militaire, et je ne sais même pas s’il était soldat ou gendarme : il m’avait donné une boîte complète et scellée de ration de combat individuelle réchauffable (RCIR), menu n° 10 (17 menus différents sont disponibles actuellement, dont 7 sans porc et 3 halal). Tout y est, jugez plutôt :
Tout cela tient vraiment dans une boîte en carton de 30 X 16 X 7,5 cm pour un poids de 1,75 kg !
Le dessus de la boîte « Menu n°10 », avec la composition, en français et en anglais, le contenu étant approuvé par l’OTAN !
Je voulais garder cette boîte en souvenir, mais j’ai finalement décidé de la tester. Un peu tard quand même, puisque la DLUO (date limite d’utilisation optimum) était dépassée d’un mois. Toutefois, aucun des produits n’était périmé, les dates individuelles étant encore valides pour 1, 2 ou 3 mois. Je précise aussi que, question nourriture, si j’aime les bonnes choses, je ne suis pas difficile, et je mange à peu près de tout, sans jamais rien gaspiller.
LE PETIT DÉJEUNER
Pour le petit-déjeuner, j’ai sélectionné la préparation instantanée arôme cacao, incluant le sucre et le lait : j’ai donc fait chauffer 15 cl d’eau (à 75°). J’ai ajouté 1 sachet de 2 biscuits de campagne (que je pensais sucrés et aux céréales), et le sachet de muesli au lait et fruits.
La préparation au cacao ressemble à ce qu’on achète dans les distributeurs de boissons : bien chaud, c’est buvable. Les biscuits sont vraiment très secs et pâteux, et je suis incapable de dire s’ils étaient salés ou sucrés : il n’y a rien sur les sachets et j’ai eu un doute. Même trempés dans le cacao, ils restent immangeables ! Le muesli (10 cl d’eau, que j’ai fait tiédir) sent bon, et ma fois c’est plutôt bon et agréable à manger : ce doit être gorgé de sucres, et donc très calorique ! Ainsi, je suis prêt pour aller… faire les courses ! Mais avant, un bon brossage des dents s’impose, car le muesli s’est incrusté partout…
LE DÉJEUNER
Mon menu sera simple : parmentier de canard, gâteau de semoule nappage caramel, café avec chocolat noir et pâte de fruit. Je décide d’utiliser le kit de réchauffage pour manger le parmentier de canard chaud.
C’est incroyable : une minuscule boîte de 12 X 9 X 2 cm contient un réchaud pliable, une pince de préhension (pliable elle-aussi), 6 pastilles de combustible solide, une boîte d’allumettes, une fourchette pliable en plastique, un sac à déchets, et 6 comprimés de purification de l’eau.
… le plus marrant, c’est la pince de préhension, qu’on voit sur le dessus de la boîte de parmentier !
J’ai posé la boîte sur le réchaud, et j’ai attendu que la pastille de combustible ait fondue entièrement. On entendait que ça mijotait bien. J’avais heureusement prévu une assiette, mais j’ai eu du mal à attaquer le parmentier avec la mini-fourchette en plastique ! Je dois dire aussi que ce mets n’était vraiment pas terrible : la purée (63,5%) est sèche et insipide, et le hachis de viande et légumes (36,5%) n’a que très vaguement le goût de canard. Heureusement, un petit verre d’Edelzwicker (non prévu dans la boîte de ration) m’a aidé à en venir à bout.
Le dessert était nettement meilleur, agréable même, grâce au caramel. Et là, une petite cuillère perso m’est venue en aide ! Pour le café, la notice conseille 14 cl d’eau chaude, mais c’est beaucoup trop : il a vraiment goût d’eau, je ferai mieux ce soir. Le chocolat noir (Poulain, quand même) était bon, et la pâte de fruit framboise délicieuse. Du coup, je ferai bien la sieste, mais non, ce n’est pas prévu au programme de la journée de ration ! Par contre, le hachis de canard nécessite un brossage soigné des dents.
LE GOÛTER
Ce sera très simple : un thé Royal Ceylan, un sachet de 2 biscuits de campagne (je vais essayer l’autre sorte), et la barre « commando » de riz soufflé arôme café. Heureuse surprise : le thé, bio et issu du commerce équitable, est délicieux, et comme d’habitude je ne le sucre pas. Les biscuits de l’autre espèce sont toujours aussi secs (même trempés longtemps), et je ne sens ni le sucre ni le sel, mais le riz soufflé est bon !
LE DINER
Encore un menu simple : potage (velouté de poule, pâtes et carottes), plat cuisiné (salade italienne), et café. Le potage nécessite 1 quart de litre d’eau chaude : il n’a guère de goût, les pâtes minuscules sont et restent très dures, et l’ensemble me paraît extrêmement salé (je ne rajoute presque jamais de sel dans ma nourriture). La salade italienne, avec pâtes, jambons et légumes, sera réchauffée doucement à la casserole dans un petit fond d’eau, et j’ai rajouté les 2 sachets de poivre. C’est ma fois bon, et même si les gros cubes de jambon sont peu intéressants, les pâtes et les légumes (dont des tomates séchées) me font bonne impression. J’apprécie donc encore plus le petit verre de Languedoc rouge que je m’octroie. Quant au café, avec 2 fois moins d’eau qu’à midi, il sera largement buvable.
LE 5ème REPAS
Plus tard, un peu avant minuit, je termine cette drôle de journée avec un 5ème repas, comme on disait à l’époque des jolies colonies de vacances. Ce sera un thé (thé vert de Chine à la menthe), 2 biscuits de campagne (je suis têtu), et le sachet de confiture de prune. Le thé (bio équitable) est délicieux, mais la surprise vient des biscuits : avec de la confiture dessus, ils deviennent mangeables ! Pas excellents, loin de là, mais corrects… Et hop : dernier brossage de dents.
CONCLUSION :
La ration du soldat en opération n’est évidemment pas équilibrée, puisqu’il n’y a ni crudités, ni légumes, ni fruits. Cela m’a manqué, comme l’absence de pain ! La nourriture est très salée ou extrêmement sucrée, ce qui ne change pas des plats préparés qu’on trouve en grandes surfaces, ou de la malbouffe des chaînes de restauration rapide. Plus surprenant, la nourriture n’a quasiment pas besoin d’être mâchée, on croirait de la bouillie pour bébés. Bon, j’exagère, mais c’est quand même bizarre. Moins surprenant : c’est globalement mangeable, mais pas très gouteux. Le soldat ne doit pas prendre son pied en mangeant, c’est juste une nécessité vitale, point barre.
Je n’ai pas tout mangé : en particulier, je n’ai touché ni à la boîte de rillettes, ni à la boisson isotonique, ni aux caramels, ni au sel. Je n’ai pas utilisé le sachet à déchets, et pas davantage celui des mouchoirs, ni les comprimés de purification de l’eau. Ce que je n’ai vraiment pas apprécié (malgré le 5ème repas), ce sont ces fichus biscuits de campagne ! Et aussi la grande quantité de déchets que ce type de nourriture engendre. Ce que j’ai vraiment apprécié, ce sont les sachets de thé bio-équitable, et le mimi kit de réchauffage, pratique et efficace.
En conclusion, je ne prendrai jamais une boîte de ration de combat pour partir en grande randonnée, c’est clair ! Même si « les rations de combat françaises ont très bonne réputation par rapport à celles d'autres pays, de sorte qu'elles font l'objet d'un troc », comme le précise Wikipédia…
ET AUTREFOIS ?
Voici la photo d’une ration de combat T5 de 1984, récupérée sur Internet. Elle me rappelle assez ce que nous avions lorsque j’ai fait mon service militaire en 1972-73. J’y ai retrouvé le paquet de cigarettes « Troupes » et la boîte de bœuf assaisonné, le fameux « corned beef » américain, que tout le monde appelait « singe ». Un souvenir aussi : la petite boite métallique ronde à droite, marquée « La Cascade », contenait un abominable fromage fondu : on le mettait à chauffer dans notre quart (nous avions presque tous un petit réchaud camping-gaz dans le sac à dos), avec l’eau de vie dont on voit le petit flacon derrière la boîte de bœuf. Cela donnait vite une fondue très agréable, d’autant que nous avions du pain et des fourchettes, et qu’il faisait froid !
Textes et photos : Pierre Brunner, avril 2017 (sauf photo DR).
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